mar, 23/04/2024 - 13:07
Des sociétés comme Anthropic, Photoroom, Bioptimus, ou encore le français Mistral, illustrent parfaitement cette nouvelle tendance. En l’espace de 18 mois, ces entreprises ont réussi à lever des montants astronomiques, 20 millions d’euros en pré-Seed, plus de 100 millions en Seed allant jusqu’à 500 millions dès la série A… Et ce malgré un chiffre d’affaires souvent minime, voire inexistant. Cela pousse à s’interroger sur la rationalité des valorisations attribuées à ces jeunes pousses de l’IA. Rien de plus facile, bien sûr, que de crier à une valorisation folle qui ne serait que le fruit d’un enthousiasme irrationnel de quelques investisseurs déconnectés. Cependant, une analyse plus nuancée révèle que ces évaluations reposent sur trois piliers fondamentaux : l’ampleur des profits futurs envisageables, la rapidité de la croissance attendue, et la probabilité de concrétisation de ces prévisions.
L’ampleur des profits ? L’impact potentiel des modèles de fondation de l’IA est colossal. Ces technologies promettent de révolutionner des secteurs entiers, de la programmation informatique à la découverte de nouveaux médicaments, en passant par une compréhension plus profonde des mystères de l’univers. Les marchés cibles pour ces innovations sont géants, justifiant des valorisations qui pourraient atteindre des centaines de milliards d’euros.
La rapidité ? L’accélération du progrès technologique dans le domaine de l’IA dépasse toutes les attentes. Les avancées récentes dans les modèles de fondation, les fameux « moteurs » GPT (Generative Pretrained Transformer), démontrent une capacité à générer des innovations à un rythme sans précédent. La vitesse de calcul suit, avec des composants tels que ceux de NVidia (dont la valorisation boursière explose). Et la data est désormais à la base de toute démarche scientifique (avec la science ouverte), industrielle (avec l’IoT notamment), ou commerciale (avec des données first party, etc.).
La concrétisation ? Cette vitesse d’exécution suggère que les retombées économiques de ces technologies pourraient se matérialiser plus rapidement que prévu, renforçant l’attrait pour les investisseurs à la recherche de croissance explosive. Et ces sociétés vont entrainer dans leur sillage l’éclosion ou l’adaptation d’ESN, d’éditeurs spécialisés basés sur ces outils, d’agences de conseil IA… Un marché qui est aussi vertigineux.
Mais il y a des incertitudes. Les barrières à l’entrée sont considérables. Les compétences requises pour développer ces technologies avancées sont rares, concentrées entre les mains de quelques centaines d’experts mondiaux. De plus, les coûts associés au développement et à l’entraînement de modèles de fondation de l’IA sont astronomiques, se chiffrant en centaines de millions d’euros. Ces obstacles limitent la concurrence et augmentent les chances de succès pour les entreprises ayant déjà sécurisé leur positionnement et leur financement.
Face à ces éléments, il est tentant de voir dans ces valorisations non pas une bulle irrationnelle, mais le reflet d’une conviction profonde dans le potentiel transformateur de l’IA. Les investisseurs semblent parier sur un bouleversement majeur, capable de redéfinir notre économie et notre société.
L’avenir nous dira si ces valos précoces et ambitieuses étaient le signe avant-coureur d’une révolution technologique sans précédent ou le reflet d’un excès d’optimisme des marchés financiers. Quoi qu’il en soit, l’évolution de ces startups d’IA représente un phénomène fascinant à observer, au carrefour de l’innovation technologique, de la finance et de la prospective économique.
Même si cela ne doit pas occulter les risques inhérents à un tel pari, qui, eux, ne sont pas financiers. Les défis techniques, éthiques et réglementaires liés au déploiement à grande échelle de l’IA sont considérables. La capacité de ces startups, et de tout l’écosystème qui suivra, à naviguer dans ce paysage complexe tout en convertissant leurs avancées technologiques en produits viables et rentables, reste incertaine.
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