ven, 07/06/2019 - 13:18
La France se digitalise. Le mot ‘transformation’ est dans la bouche de tous les dirigeants, quel que soit leur secteur d’activité. Ainsi, de plus en plus d’entreprises sollicitent des compétences techniques et expertes dans le numérique. Des emplois qui ont de plus en plus de mal à être pourvus, faute de ressources. Au-delà d’un problème quantitatif se pose la question de la pérennité des formations. L’apparition permanente de nouvelles technologies s’accompagne en effet d’un renouvellement constant des métiers. Face à ces bouleversements, notre système éducatif peine à suivre. Les partenariats avec le secteur privé se multiplient donc, au risque parfois d’enfermer les étudiants dans des doctrines technologiques. L’État doit donc se saisir de ce sujet sans attendre !
Des formations déjà obsolètes à peine dispensées
Le besoin croissant des entreprises à maîtriser ce qui est devenu le nerf de la guerre, à savoir leurs informations numériques et toute la data qui en découle, crée une pénurie sans précédent sur le marché de l’emploi dans la Tech. Surtout, de nouvelles technologies apparaissent continuellement (Blockchain, Cloud, Machine Learning, IA, etc.), qui nécessitent de mettre en face les compétences adéquates. Ainsi, de nouveaux métiers qui n’existaient pas il y a encore 1 ou 3 ans se créent : Datalake Officer, ingénieur Cloud, Traffic Manager…
Si certains ne sont que des évolutions de fonctions déjà existantes, leurs missions ont considérablement changé, exigeant de nouveaux savoirs. Certes, les entreprises tentent d’identifier en interne des profils capables de migrer vers ces fonctions, mais la plupart d’entre eux ne disposent pas des bagages techniques suffisants pour être réellement opérationnels. Ces vagues technologiques successives rendent donc les compétences des collaborateurs et celles des futurs collaborateurs très rapidement obsolètes.
Un État conscient, mais dépassé
Il y a 2 ans, une initiative publique a été menée pour étayer ces nouveaux besoins. Les entrepreneurs de la French Tech ont soumis la proposition de créer un bac numérique dans le cadre de la loi Pacte. Si celle-ci n’a pas été retenue dans le projet final, on sent néanmoins une vraie prise de conscience de la part de l’État sur ce sujet. La récente réforme du secondaire intégrant un cursus autour des sciences de l'ingénieur, du numérique et des sciences informatiques en est une illustration. Mais il faut aller plus loin.
Les entreprises de la Tech ont un rôle à jouer dans ce mouvement. Elles doivent prendre leurs responsabilités et les devants pour ne pas laisser l’Éducation Nationale seule face à ce défi majeur qui les concerne directement.
Les entreprises face à leurs responsabilités
Ainsi, de plus en plus d’entreprises formalisent des partenariats avec de grandes écoles pour prodiguer des enseignements concrets, organiser des conférences ou des cours d’initiation aux technologies émergentes. L’idée est de compléter l’enseignement professoral par une expertise technique et métier plus opérationnelle.
Pour celles qui se lancent dans une telle démarche, cela représente un investissement en termes de ressources humaines, puisque leurs experts sont détachés plusieurs fois par mois dans ces écoles, mais également financier. Si elle peut être saluée, elle n’en présente pas moins un écueil de taille, sur lequel l’État doit rester très vigilant. Pour prendre tout son sens, cette démarche de participation active à la formation des futurs talents français doit s’inscrire dans une réelle dimension sociale et éducative. Or, la majorité des entreprises qui l’entreprend le fait dans l’optique de se faire connaître des étudiants. Ainsi, plutôt que de délivrer un enseignement agnostique, elles les forment à leurs propres méthodes et outils et, de fait, les enferment dans une doctrine technologique qui ne profite au final qu’à elles-mêmes.
Créer un triangle vertueux État/Éducation nationale/Entreprise
L’État doit considérer cette aide et la soutenir lorsque son seul but est d’améliorer les compétences des futurs collaborateurs sans les restreindre à une technologie propriétaire. Or, le temps administratif et celui de l’innovation sont aux antipodes. L’État doit donc se mettre en mode agile sur ce sujet. Pour commencer, il lui faut écouter ces acteurs qui souhaitent participer à la formation des talents. Il est temps de mettre en place un triangle vertueux État/Éducation Nationale/Entreprise. Les écoles sont demandeuses et s’inscrivent déjà dans cette dynamique. Mais, dans l’urgence, elles se laissent séduire par des entreprises peu scrupuleuses.
Un programme d’incitation fiscale pourrait être créé à l’image du CIR (Crédit Impôt Recherche), pour motiver les entreprises à recruter des personnes qualifiées dévolues à la création de cursus au sein des écoles et dont les enseignements soient encadrés par l’État. Il en va de la future compétitivité de la France sur la scène internationale !
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