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Par :
Sébastien Lefebvre

jeu, 24/05/2012 - 14:53

L’introduction en bourse de Facebook a monopolisé l’attention de tous les médias en fin de semaine dernière. S’il est évidemment trop tôt pour tirer un quelconque bilan de cette IPO, avec une valorisation de l’ordre de 104 milliards de dollars, il n’en reste pas moins que les chiffres sont vertigineux, pour ne pas dire historiques.

Mais au delà de l’aura dont bénéficie le réseau social, nous pouvons nous interroger sur ses atouts et les difficultés qu’il pourrait rencontrer à faire durer son état de grâce. Par Sébastien Lefebvre, PDG et fondateur de Mesagraph.

Facebook, la publicité, et après ?

Facebook tire principalement ses revenus de la publicité. Comme Google. Si vous êtes l’un de ses 900 millions d’utilisateurs, vous avez peut être remarqué lorsque vous vous connectez avec votre navigateur favori, que les publicités sont, dans l’ensemble, peu attractives et mal ciblées.

D’ailleurs, les performances de Facebook comme support publicitaire sont loin de satisfaire l’ensemble de ses clients. Ainsi, General Motors a affiché récemment une diminution importante du budget alloué à Facebook invoquant son “manque d’efficacité”.

Aller plus loin au niveau du ciblage publicitaire constitue un écueil potentiel important pour une société qui a déjà beaucoup fait parler d’elle pour sa relation floue avec la confidentialité des données, jugée un peu trop laxiste.
De plus, de nombreux utilisateurs confient leurs données, parfois à leur insu, à des applications Facebook. Ce portefeuille d’applications constitue pour Facebook une source de valeur potentielle immense sans qu’elle soit directement « bankable » pour la société. C’est toutefois un vivier dans lequel Facebook pourra se servir lorsque sera venu le temps de faire des choix stratégiques.

Facebook va devoir être extrêmement vigilent et innover pour trouver l’équilibre entre l’hyperciblage et la protection de la vie privée de ses utilisateurs.

Une base d’utilisateur monstrueuse et une adoption immédiate

L’ensemble des applications mobiles, des blogs, des sites e-commerce, ont déjà adopté les fameux boutons “like” et permettent souvent une authentification “Facebook Connect”, permettant à l’éditeur du site ou de l’application de récolter du même coup des données sur ses utilisateurs.

Mais cette adoption massive, où chaque application essaye de gagner en visibilité en permettant à ses utilisateurs de partager leur expérience, est aussi génératrice d’un contenu abondant qui aboutira de manière inévitable à un phénomène de saturation.

Les performances de Facebook en tant qu’outil de génération de trafic et de publicité ont donc de forts risques de diminuer dans le temps. Des applications comme « Spotify » en ont bénéficié largement, mais cela n’est pas reproductible à l’infini et faire des extrapolations sur la base des performances d’aujourd’hui ne peut que conduire à des désillusions.

Le rôle de l’Opengraph

En plus de sa base d’utilisateur colossale, Facebook dispose d’un autre atout majeur : l’Opengraph.

En un mot, en demandant aux créateurs de sites et d’applications d’adopter l’Opengraph Protocol, Facebook instrumentalise le Web et construit une base de données qui stocke l’ensemble des liens d’affinité entre chaque utilisateur et des éléments de contenu. Cette connaissance fine, multi-dimensionnelle est un atout extrêmement important pour doter Facebook de capacités de recherche personnalisées et pour cibler au mieux les publicités selon les centres d’intérêt des utilisateurs.

La bataille des géants sur ces sujets est lancée : Eric Schmidt, l’ex-CEO de Google, qui avait déclaré « I screwed up with Social Networking », dont la traduction pourrait être « j’ai raté le train des réseaux sociaux » et a initié Google+. Plus récemment, Google a annoncé un changement global de ces conditions d’utilisation pour refléter l’intégration de Google+ dans l’essentiel des produits et services Google.

De manière plus confidentiel, notons aussi que Google a lancé, dans la foulée de l’introduction en bourse de Facebook, la fonctionnalité Knowledge Graph, rendue possible par l’acquisition de Metaweb courant juillet 2010.

Mais l’importance de l’activité sur les réseaux sociaux pour la recherche se reflète aussi dans Bing, avec l’introduction de liens Facebook et Twitter.

On le voit, les signaux des réseaux sociaux pour l’ensemble des thèmes s’insère partout, pour augmenter la pertinence des résultats de recherche, les mettre en contexte, à la fois par rapport à l’ère du temps, mais aussi en se recentrant sur l’utilisateur.

Une arrivée massive de cash dans la Silicon Valley : du souffle pour l’écosystème

Avec l’introduction en bourse de Facebook, ce sont plus de 1000 employés, dont l’essentiel réside en Californie, qui sont devenus millionnaires.

Il y a fort à parier que ces nouveaux millionnaires, qui connaissent parfaitement le fonctionnement des réseaux sociaux, de l’économie numérique et qui ont un réseau extrêmement dense, vont être à l’initiative d’investissements dans de nouvelles startups.

Ces nouvelles startups créeront de nouveaux services gravitant autour de Facebook, ce qui permettra d’augmenter la valeur globale de l’écosystème.

Plus important encore, cette dynamique introduira une diversification dont Facebook a réellement besoin pour générer du cash à long terme.

« Too big to fail », mais vigilant

Beaucoup d’incertitudes planent encore sur la capacité du réseau social à assouvir ses ambitions. Mais une chose est certaine, l’innovation devra être au cœur des réflexions.

En se dotant de l’Opengraph, Facebook a déjà bâti l’infrastructure indispensable à ses évolutions futures et dispose de quantités de données colossales à analyser.

Mais alors que nous n’en sommes qu’au début de l’ère Facebook et que rien ne semble lui résister, la société a annoncé un recul de 7,5% de ses recettes publicitaires au premier trimestre 2012. Le symbole d’un besoin de renouveau de ses sources de revenus qui résonne comme une première petite alerte et qui relance une fois de plus la question : Facebook est-il vraiment « Too Big to Fail ? »

Sébastien Lefebvre, PDG et fondateur de Mesagraph

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