mer, 29/01/2014 - 11:43
Le métier d’ingénieur informatique qui vise à rationnaliser les organisations et à formaliser leur complexité est l’un des profils les plus recherchés aujourd’hui. Les diplômés des grandes écoles françaises, dont la réputation n’est plus à démontrer hors de nos frontières, sont, ainsi, particulièrement courtisés…
Mais c’est sans compter la révolution digitale amorcée qui bouleverse les projets informatiques et va obliger le métier à évoluer. L’ingénieur informatique de demain, s’il veut être source d’innovation et de richesse, ne devra plus se contenter d’être un optimisateur ou un modélisateur, il devra aussi être un créateur… Par Soria Boucebaine, Responsable RH Ysance.
Selon les différentes prévisions, les recrutements dans le secteur dit « technologique » devraient atteindre 200.000 postes en France, d’ici à 2020 (dont 80.000 dans l’informatique), offrant la part belle aux jeunes diplômés et, notamment, aux ingénieurs français dont la bonne réputation dépasse largement nos frontières.
Les géants américains tels que Google, Twitter ou Facebook sont d’ailleurs de gros recruteurs d’ingénieurs français tout comme la Chine qui plébiscite particulièrement « l’excellence française ». En cause, une sélection très poussée à l’entrée, un socle méthodologique en ingénierie passé au crible, une solide culture scientifique et le gage d’une qualité d’apprentissage unique fourni par la CTI (Commission des Titres d’Ingénieurs).
Malgré ces nombreuses grandes qualités, l’enseignement de la majorité des écoles d’ingénieurs françaises reste, encore aujourd’hui, trop axé sur la pédagogie et sur la recherche, et manque d’un volet plus pratique pour coller aux nouveaux besoins des entreprises qui entreprennent le virage du numérique. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’on voit apparaître des écoles « nouvelle génération », comme l’école 42 ou l’EMI, qui cassent cette norme d’enseignement construite sur un schéma pyramidal, pour la déplacer vers la technique et le développement, sources d’innovation et de richesse.
Pourtant, s’il y a bien un domaine dans lequel nos jeunes ingénieurs diplômés peuvent se distinguer c’est dans bien dans celui de la programmation et du développement. Car ces touche-à-tout, a priori formés pour devenir des conducteurs de grands projets et en appréhender les problématiques complexes, ont également toutes les cartes en main pour être les créateurs d’innovations numériques de demain.
Facebook aurait-il ainsi vu le jour si Marc Zuckerberg n’avait pas mis ses talents d’ingénieur au service du code ? Idem pour Twitter avec Jack Dorsey ou Microsoft avec Bill Gates ? D’autres sociétés américaines ont, depuis, suivi ces exemples sans équivoque pour valoriser et démystifier le métier de développeur.
Il est bien dommage que les mentalités n’évoluent pas aussi vite dans l’Hexagone et que les entreprises françaises ne prédestinent pas plus ces grands diplômés au poste de développeur avec toute la valorisation que doit avoir ce métier, plus que jamais créateur de valeur à l’heure du « tout digital ». En France, le prédéterminisme du diplôme l’emporte sur le parcours professionnel. Etre un développeur et un polytechnicien est souvent antinomique. Or, la valeur est, aujourd’hui, dans le code, car avoir de bonnes idées sans personne pour les formaliser ne sert à rien. Le développeur est, par exemple, l’élément clé dans la construction d’une plateforme digitale, si stratégique pour l’entreprise.
Il faut donc que cette excellence à la française sache se déplacer de la recherche fondamentale vers l’application concrète de cette intelligence dans le développement.
L’entreprise Criteo est, d’ailleurs, un parfait modèle français de réussite. Ses fondateurs, tous ingénieurs, ont pris le pari de descendre dans « les couches basses » de la programmation pour matérialiser leurs idées et en faire un succès à l’international. Il en est de même pour l’éditeur open source français Talend. Ces modèles doivent devenir des références pour faire avancer les mœurs et pousser les entreprises françaises à valoriser le métier de développeur. Car l’équation est simple : plus il y aura de têtes pensantes au poste de développement, plus on tirera vers le haut la qualité des projets informatiques français qui feront non seulement bouger l’économie du pays, mais seront aussi en mesure de s’imposer sur les marchés internationaux. C’est là tout le bien qu’on peut souhaiter au numérique « made in France ».
Soria Boucebaine, Responsable RH Ysance
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