Difficile de dresser un panorama précis du monde des langages corrélé aux métiers qui recrutent. Si le monde semble en effet se diviser entre Java et .Net, force est de constater que beaucoup de développeurs ont acquis d’autres langages. En particulier PHP. Dans le but de trouver un emploi sur un marché qui repart à la hausse, et aussi de s’offrir des projets en fonction de leurs propres aspirations.
Le Top 10 des langages demandés en juin 2006 sur le site lesjeudis.com est formel : JavaEE (224 offres) est largement en tête. Il est suivi par Java (167), C/C++/C# (143), .Net (97), SQL (52). En faisant une recherche par " métier ", on constate que la double compétence Java/Java EE est le plus souvent requise, montrant la nette supériorité de ces langages associés
face aux autres. Pourtant, en poursuivant le classement, on découvre en septième position Cobol (20 offres), placé juste derrière Abap (27). Ce qui signifie que ce langage déjà ancien a toujours ses adeptes et qu’un bon spécialiste peut évoluer dans ce domaine. La raison en est simple : " un langage de programmation ne disparaît pas comme ça ", indique Francis Balland, PDG de l’organisme de formation Learning Tree. Il en est de même pour le langage Lisp… redécouvert par certaines entreprises. " Ce langage objet date de 1967 et a été enseigné à Jussieu ! ", indique Luc Carité, formateur chez Learning Tree et ingénieur au CNRS.
L’énigme PHP, alpha et omega des langages ?
En reprenant le Top 10 des langages sur le site lesjeudis.com, on trouve PHP placé "seulement" en neuvième position (avec 15 offres associées). Un comble pour ce langage qui séduit les administrations et nécessite donc un nombre important de développeurs ! Autre constat : par son approche "libre", il permet aux débutants comme aux spécialistes de développer un programme, de l’alpha à l’omega ! Rares sont d’ailleurs les jeunes diplômés qui ne le pratiquent pas, même si l’exemple de Priscillia Bigorgne est hors du commun. Cette diplômée de l’UTT (ingénieur en systèmes d’informations et télécommunications) est aujourd’hui chef de projet au sein de l’entreprise Bysoft (SSII travaillant en Offshore). Or, elle a été la première Française à obtenir la certification PHP le 7 février dernier ! Elle l’utilise au quotidien puisque sa mission consiste à être l’interface entre les clients et l’équipe technique dans une société présente en France et en Chine. De plus, elle est responsable du pôle de compétence PHP. Ce choix de PHP ? " La facilité d’apprentissage. Nous avons des équipes de développeurs en Chine et il est très facile de les former rapidement ". Autre avantage, selon Priscillia Bigorgne : le nombre d’outils Open Source basés sur PHP, sachant que " Bysoft propose, entre autres, des offres basées sur les outils tels que Oscommerce et Spip " et surtout " les classes disponibles et permettant de ne pas réinventer la roue et donc de gagner en temps ! ". Si Priscillia Bigorgne possède bien évidemment C et Java et travaille pour son entreprise avec les langages adéquats au projet, sans rejet et sans a priori, elle avoue malicieusement avoir pourtant eu " un coup de coeur pour PHP ". Et pour une raison essentielle : " l’approche de PHP est très simple, mais ses applications sont quasiment illimitées. Le fait qu’il soit orienté Web n’y est pas étranger. Le débutant y trouve son compte et se l’approprie, très facilement. Il peut rapidement devenir un bon praticien. Le confirmé y trouvera d’autres centres intérêts et trouvera des idées auprès de la communauté qui est très active. S’il y avait une idée à retenir, c’est que PHP permet au développeur de retrouver un rôle de créateur ".
PHP, plébiscité à 60% par les développeurs de TopDev 2006
PHP séduirait-il les cohortes de développeurs, alors que le marché le relègue au mieux à la troisième place, derrière ses deux autres rivaux ? Cette thèse semble confirmée par Chrystel Coassin, créateur et développeur de TopDev : " lors de cette édition TopDev 2006, quatre environnements de développements Web étaient autorisés : PHP version 4 et version 5 ; Java tournant sur serveur Tomcat ; environnement .Net incluant notamment ASP.Net, C# et enfin Python, fonctionnant en mod_python sous Apache. Sur les 771 participants, 42% ont réalisé une application en PHP, 28% en Java, 23% en .Net et 7% en Python ". Une raison à ce triomphe de PHP, en contradiction totale avec les autres langages demandés sur les sites d’offres d’emplois ? Chrystel Coassin a son idée sur la question : " Le profil du développement demandé lors du concours impose une capacité de développement très rapide. Il est donc normal de retrouver une grande participation en PHP. De plus, les contraintes transactionnelles, de résistance à la charge étaient faibles ". Et d’apporter cette conclusion de troisième voie, que tout le monde connaît mais fait mine d’ignorer dans un univers informatique organisé de manière bipolaire entre les langages Java et .Net : " il est à noter que les étudiants, pour plus de la moitié d’entre eux, ont préféré l’utilisation de PHP, alors que celui-ci n’est quasiment jamais enseigné en universités et écoles d’ingénieurs ! Au sein des développeurs PHP, très peu ont utilisé la version 5. Cette version qui est prévue pour concurrencer Java et .Net avec une meilleure gestion objet n’a pas encore trouvé sa place dans le concours. J’ajouterais que d’un point de vue géographique, les Français qui représentaient la moitié des participants ont plébiscité la programmation PHP à plus de 60%. Quant aux participants venus d’Inde, de Chine, du Bangladesh, du Japon et du Pakistan, ils ont opté pour Java à 60% ". " Le débat sur les langages est trop souvent une question de part de marché ", déplorent Francis Balland et Luc Carité de Learning Tree. Le constat est amer. Mais la réponse des informaticiens choisissant, au contraire de leurs aînés, PHP, préfigure une inévitable évolution : jeunes diplômés accédant demain aux postes de DSI, ils pourraient bien revisiter les langages à l’aune de leur outsider préféré !